Les bons réflexes et attitudes à avoir pour aborder ce difficile sujet avec votre enfant ou votre ado. Destinés au jeune public, le magazine Astrapi et les journaux Mon Quotidien, Mon Petit Quotidien et l’Actu ont décidé de publier des suppléments spéciaux afin d’expliquer les attentats de Paris à leurs lecteurs tout en répondant aux questions qu’ils peuvent se poser.
Attentats de Paris : comment répondre aux question des enfants
Voici le communiqué publié sur le site du groupe Bayard Presse qui explique notamment comment le supplément d’Astrapi a été bâti et à qui il est destiné.
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« Je n’ai pas vu d’images mais je ne préfère pas voir car je pense qu’il y a des choses horribles. Je veux juste comprendre pourquoi ils ont fait ça. »
Noé, 10 ans
« C’est vrai que la France en fait, elle est en guerre ? »
Julie, 8 ans
« Est-ce que les terroristes, ils peuvent venir dans notre maison ? »
Antoine, 7 ans
Tous les jeunes sont concernés
Les attentats que nous connaissons depuis hier, 13 novembre, nous choquent tous. Nous vous proposons, parents, adultes, de relire cette interview de la pédopsychiatre Catherine Jousselme qui, au moment des attentats de janvier 2015, nous expliquait comment les enfants réagissent à des évènements violents de ce type et comment nous pouvons leur en parler.
Les enfants petits et grands
Qu’ils aient été confrontés à l’information directement ou pas, ressentent cette atmosphère et nos sentiments très vifs. La première chose à faire, quel que soit l’âge de vos enfants, est de les informer directement.
Il faut leur expliquer ce qui s’est passé
Un attentat, des morts, des gens qui ne veulent pas qu’on exprime librement ses idées. Bien sûr, suivant l’âge des enfants, les réponses et les explications seront différentes. Le professeur Catherine Jousselme, pédopsychiatre à la Fondation Vallée à Gentilly, nous aide à trouver les bons mots et les bonnes réactions.
Avec un petit de moins de 6 ans
Catherine Jousselme conseille de ne pas montrer d’images et d’en rester à l’information de base. Les adultes doivent dire que ce qui vient de se passer est grave pour tout le pays, que cela les touche et les émeut. Surtout, les enfants doivent comprendre que les adultes sont là et s’organisent pour protéger tous les habitants de la France.
Les enfants plus grands, jusqu’à 10 ou 11 ans
Ils doivent pouvoir en parler. À leurs questions, mais sans les devancer, il faut apporter des réponses factuelles. Les échanges avec vous doivent aussi leur permettre de comprendre que les adultes, et l’État, veillent à ce que cela ne se reproduise pas, que les coupables sont recherchés et que la fraternité et la solidarité sont les seules réponses possibles. Parler avec eux, leur proposer de dessiner ce qu’ils ont compris, expliquer les images s’ils y ont été confrontés : ce sont des façons simples de leur permettre de juguler des inquiétudes et des angoisses qui pourraient les envahir.
Les enfants ne réagissent cependant pas tous de la même façon
Certains seront plus touchés que d’autres malgré l’attention des parents. Un enfant qui ferait des cauchemars fréquents dans les semaines qui viennent, qui perdrait le goût de jouer ou de manger devra être l’objet d’une attention toute particulière. Il faudra l’inciter à s’exprimer, en discutant, en dessinant avec lui. Voire en lui permettant de rencontrer un professionnel – médecin, psychologue, psychiatre – qui saura l’aider.
Les adolescents sont eux exposés à l’information très directement via internet et les réseaux sociaux
Plus ils sont informés, plus il est nécessaire d’être présent auprès d’eux. Il faut les aider à cadrer leurs réactions et redonner des informations simples sur la loi qui protège la liberté d’expression et pose l’interdit du meurtre ainsi que la nécessité d’être solidaires face à un événement d’une telle violence qu’elle peut entraîner des réactions en chaîne. Il est important qu’ils sentent que les adultes sont des soutiens solides, tant dans la famille qu’à l’école.
Certains peuvent être confrontés à des propos violents d’autres adolescents autour d’eux ou sur les réseaux sociaux
S’ils vous rapportent ces propos, il faut les assurer que la réponse n’est pas dans cette spirale de la violence et signaler éventuellement ces comportements au collège ou au lycée. Ce sont aux adultes de régler ces questions, pas à eux. Enfin, il ne faut pas les laisser seuls confrontés à toutes les images auxquelles ils ont accès si facilement sur leurs téléphones, leurs ordinateurs ou à la télévision. Ce flot d’images peut être très angoissant et les enfermer dans une vision très dégradée de la vie en société. Aidez-les à faire autre chose et à discuter, notamment à l’aide de ce document réalisé par le magazine Astrapi.
Les attentats expliqués dans les écoles aujourd’hui
– Un temps de recueillement et un échange avec les élèves
Les élèves participent à une minute de silence ce lundi. Elle est suivie d’un temps de recueillement et d’échange supervisé par leurs enseignants (eux-mêmes sensibilisés sur ces délicats sujets). Tout cela sera évidemment adapté à l’âge et à la sensibilité des élèves.
– Des cellules psychologiques dans certains établissements
Des cellules psychologiques sont déployées dans les écoles, les collèges, les lycées et les autres établissements en Ile de France. Ce dispositif pourra être étendu à d’autres établissements à la demande des directeurs et chefs d’établissement.
– Pas de voyages ou de sorties scolaires jusqu’au 22 novembre
Voyages et sorties scolaires sont suspendus jusqu’au 22 novembre. Aucun retour anticipé n’est prévu pour les enfants actuellement en voyage scolaire.
Questions/réponses pour aider les parents à aborder le sujet
Pourquoi les terroristes s’en prennent-ils à nous ? L’ont-ils fait pour se venger ?
La France, comme d’autres pays (ex. : les Etats-Unis), est en guerre contre les terroristes de l’Etat islamique (appelés djihadistes) qui ont pris le contrôle d’une partie de deux pays : la Syrie et l’Irak. Depuis 2014, des avions français ont lancé des bombes en Irak contre ces terroristes. Et depuis quelques semaines, ils en ont lancé contre eux en Syrie. Ils visaient des camps où s’entraînaient peut-être des Français pour commettre ensuite des attentats dans notre pays. Ces terroristes ont décidé de se venger en semant la terreur en France et en tuant des gens. Le groupe Etat islamique a d’ailleurs dit ce samedi que c’est lui qui avait organisé ces attentats. Notre pays avait déjà été attaqué en janvier par des terroristes.
Pourquoi ont-ils choisi de tuer ces gens-là ?
Les terroristes ont tué des gens qui étaient au restaurant, dans une salle de concert ou à un match de foot. Ils ont ainsi touché des endroits de fête et attaqué notre façon de vivre habituelle. Ils pensent que ces activités sont mauvaises par rapport à leurs croyances.
Pourquoi la religion fait-elle faire des choses horribles aux terroristes ?
Les terroristes sont prêts à tout pour faire régner la terreur et pour imposer dans la violence leurs idées. Ils disent qu’ils combattent pour défendre leur religion. Par exemple, ils veulent imposer à tout le monde les mêmes règles très strictes. Elles viennent de leur façon à eux de comprendre le Coran, le livre sacré des musulmans. Exemples de règles très strictes : interdiction d’écouter de la musique, obligation pour les femmes d’être couvertes d’un habit noir et d’être accompagnées d’un homme pour sortir, obligation de prier…
Pourquoi les terroristes se sont-ils suicidés ?
– Ils sont prêts à tuer des gens et même à sacrifier leur vie, à mourir, pour imposer leurs idées. Ils disent qu’ils veulent mourir en « martyre ».
– C’était le cas à Paris, où il y a eu des attentats-kamikazes. C’est-à-dire que des terroristes portaient des ceintures explosives et se font fait sauter avec.
– Cela s’est déjà passé dans plusieurs pays. Mais vendredi, c’était la première fois que des attentats-kamikazes avaient lieu dans notre pays.Ceux qui ont fait ça sont-ils fous ?
– On peut dire qu’ils sont fous parce qu’ils s’attaquent à une valeur que partagent tous les hommes, celle de ne pas tuer des innocents.
– Mais les terroristes n’ont pas commis leurs attaques sur un coup de folie. Ils savaient ce qu’ils faisaient. Leurs attaques barbares, très violentes, étaient prévues, organisées.
– Certains terroristes sont manipulés. Souvent, ce sont des personnes jeunes, ou fragiles dans leur tête… D’autres personnes profitent de leurs faiblesses pour leur mettre des idées dans la tête, pour les convaincre de commettre des attentats.Est-ce qu’on est vraiment en guerre alors que ce n’est pas une armée qui se bat contre une autre armée ?
– Ce n’est pas une guerre « classique » où une armée affronte une autre armée. Ce ne sont pas des soldats qui se battent face à face.
– Mais on peut parler de guerre parce qu’il y a 2 camps opposés : des terroristes et des pays. Par exemple, les terroristes font des attaques en France. Mais l’armée française combat les terroristes dans les pays d’où ils viennent. Par exemple, elle a bombardé des camps d’entraînement de terroristes en Syrie.Est-ce que c’est la 3e Guerre mondiale ?
– C’est mondial parce que le terrorisme existe dans beaucoup de pays.
– C’est une guerre mondiale mais qui a une forme différente de la Première Guerre mondiale et de la 2e Guerre mondiale, qui opposaient des pays les uns aux autres.
– Pour lutter contre le terrorisme, la France est unie à ses pays amis, comme ses pays voisins en Europe, les Etats-Unis…Est-ce que ça va continuer ? Est-ce que c’est dangereux d’aller à l’école ?
– Tout est fait pour que de telles attaques n’aient plus lieu. Des policiers, des soldats et des espions essaient de surveiller les gens qui risquent de commettre des attentats. Mais c’est difficile. A Paris, des milliers de policiers et de soldats surveillent la ville et les lieux publics.
– Les terroristes cherchent souvent à attaquer les capitales, les grandes villes et les lieux où il y a beaucoup de monde. A la campagne, il y a moins de danger.
– Ce n’est pas forcément dangereux d’aller à l’école ou de prendre des transports en commun, par exemple, mais il faut être attentif. Des sorties scolaires vont sans doute être annulées et des barrières seront sûrement installées devant les écoles. Dans les transports, les bagages laissés seuls sont détruits.
– Oui, il y a des risques qu’il y ait d’autres attaques dans les prochains jours, dans les prochains mois. C’est ça qui est difficile dans cette sorte de guerre : on ne se bat pas contre une armée. Mais contre des tueurs qui préparent leurs attentats en cachette et attaquent d’un coup des gens innocents.J’ai peur. Est-ce normal ?
– Oui il est normal d’avoir peur face à la violence. Et c’est aussi normal d’être triste, c’est ce que l’on ressent quand des gens meurent. Tu as donc le droit de pleurer, d’être en colère, choqué ou angoissé. Nous, adultes, on ressent tout cela aussi. N’hésite pas à partager tes sentiments, à poser tes questions… Ne garde pas ça pour toi.
– Mais il faut essayer de dépasser sa peur. Les terroristes veulent justement effrayer les Français. Dans le mot terroriste, il y a « terreur », une très grande peur.
En continuant à vivre normalement, on prouve que l’on est plus forts qu’eux, on ne leur donne pas raison. Il faut donc continuer à sortir, aller à l’école, faire des courses, pratiquer ses loisirs…
– Dans de tels moments, les gens essaient d’être solidaires, de s’entraider. Il faut faire confiance et montrer de l’amour aux autres.C’est quoi l’état d’urgence ?
– Il a été déclaré par le Président de la République. C’est une situation spéciale qui dure plusieurs jours, pendant laquelle des règles particulières sont mises en place dans chaque partie de la France. Son objectif est de protéger les habitants.
Il peut y avoir un couvre-feu : une interdiction de sortir après une certaine heure le soir. Dans certaines zones, on peut interdire la circulation des voitures.
– De nombreux endroits peuvent être fermés : salles de sport, théâtres, cinémas… À Paris, et dans plusieurs départements autour, il est interdit de se réunir dans des lieux publics.
– Pour cet état d’urgence, le président de la République a aussi annoncé qu’il renforçait les contrôles aux frontières. Des policiers vont vérifier l’identité de toutes les personnes qui veulent entrer en France par les routes, en train ou en avion.
– Cette situation spéciale ne peut durer que 12 jours. Pour la prolonger, une loi doit être votée. En France, l’état d’urgence n’a été déclaré que 5 fois depuis 1955.C’est quoi le deuil national ?
– Le deuil national a été décidé par le Président de la République. Pendant cette période, plusieurs évènements ont pour but de rendre hommage (de se rappeler et de montrer son respect) aux victimes. Tous les drapeaux français installés sur les bâtiments officiels (mairies, écoles…) sont mis en berne (attachés à leur mât).
– Pendant le deuil national, une minute de silence est organisée. Elle aura lieu lundi à midi. Tout le monde arrête de travailler pendant une minute et se tait.
– Il est très rare que le Président déclare un deuil national. Depuis 1958, c’est seulement la 6e fois que cela arrive.Peut-on laisser les enfants regarder les infos sur les attentats, à la télé ?
Depuis vendredi, les images des attentats, parfois de victimes, sont diffusées en continu sur les chaînes de télé. Ces images vues en boucle peuvent impressionner et choquer des enfants. Et les commentaires, dans un langage d’adultes, sont souvent incompréhensibles pour les enfants. Mieux vaut expliquer avec des mots plutôt que des images ce qui s’est passé aux enfants. On peut prendre le temps, à son rythme, d’expliquer… Ça va moins vite que des images animées et c’est plus adapté à un jeune public. Et s’ils ont vu malgré tout des images, il ne faut pas les laisser seuls avec leurs pensées, il faut les faire parler de ce qu’ils ont ressenti, les pousser à exprimer leurs incompréhensions et à poser toutes les questions, pour bien tout expliquer.
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Le Journal Mon Quotidien, lui aussi destiné aux enfants, a laissé en téléchargement gratuit son numéro pour les 10-14 mais aussi pour les 6-10 ans (télécharger Mon Petit Quotidien). Nous proposons de découvrir le contenu destiné aux 10-14 ans et n’oubliez pas d’en parler avec eux.