L’art de rue aime généralement faire passer des messages. Quand c’est pour honorer les mémoires des victimes d’attentats, c’est de l’art, mais quand le grapheur utilise son pinceau pour dénoncer le comportement politique, cela devient une honte abominable et innommable.
Sur un mur de Grenoble est apparu un dessin où des policiers représentant l’Etat, brandissent leur bouclier 49.3 et matraquent la Marianne déjà à terre, le drapeau français déchiré à la main. Certains y verront une allusion aux capacités du gouvernement à utiliser l’article 49.3 pour faire passer des lois en urgence alors que le peuple en masse semble s’y opposer, d’autres y voient une attaque directe envers les policiers – notons qu’une petite allusion au comportement de certains membres des forces de l’ordre lors des manifestations contre la loi travail peut être décelée -.
Ceci dit, dès le début du débat, l’artiste, pour éviter tout malentendu, a préféré rajouter la phrase « L’Etat matraquant la Liberté », cela, n’a pas suffi…
Jeu des 7 erreurs #fresque Grenoble pic.twitter.com/oaWpWGCNDz
— Véronique Kwasniewski🧹🧹🐢 (@OUPSI) June 27, 2016
Le ministre de l’Intérieur face au maire de Grenoble
L’artiste Goin, qui a dessiné cette oeuvre dans le cadre du festival Street Art Fest, subventionné à hauteur de 25 000 euros par la mairie écologiste de Grenoble, ne devait pas s’attendre à un tel débat. Entre politiques qui trouvent cette oeuvre scandaleuse et apportent leur soutien aux policiers et le maire de Grenoble, Eric Piolle qui invoque la – presque oubliée du débat – liberté d’expression, les commentaires vont bon train. Suite à un tweet de Bernard Cazeneuve, c’est monsieur le maire qui s’est vu contraint de répondre au ministre outré : « Il faut que le ministre de l’Intérieur fasse la liste des œuvres autorisées ou non ».
https://twitter.com/Exyp/status/747345736648400898
Effacer cette #fresque à #Grenoble ? Détruisons aussi "La Liberté guidant le peuple" pour apologie révolutionnaire ! pic.twitter.com/mvrBfLnhz3
— Pierre-Yves (@pyb_38) June 27, 2016
Mais le mot de la fin devrait certainement être donné au public et non aux politiques en quête de polémique, raison pour laquelle, ce dernier tweet semble opportun, lui qui énonce
1- c'est l'État qui est visé et non la police
2- Un préfet ou un gouvernement n'a pas à "censurer" une oeuvre d'art ! #fresque— Benjamin Durand (@ruedesmusees) June 27, 2016
Toujours est-il que Grenoble n’entend pas effacer cette oeuvre sur le champ, et pour cause, 18 mois après Charlie, le maire entend faire respecter la liberté d’expression sur sa ville. La fresque sera donc détruite comme les autres, dans les jours ou semaines qui viennent, lorsque les travaux programmés par la mairie auront lieu, pas avant.