Un skieur qui a filmé sa chute de 6 mètres dans une crevasse est resté coincé durant une trentaine de minutes, à plus de 4.000 mètres d’altitude.
Benjamin Spilthooren est un alpiniste français qui skiait sur le glacier du Strahlhorn situé à 4.190 mètres d’altitude, en Suisse, le 24 mai dernier. Il a pu filmer sa chute avec sa caméra fixée sur son casque pendant les trente minutes où il est resté coincé au-dessus du vide.
Il y a plus d’un an, un alpiniste américain était resté coincé dans une crevasse après une chute de 20 mètres.
Au moment où je tombe dans la crevasse je m’accroche aux bords par reflexe. Je comprends immédiatement ce qu’il m’arrive mais je ne peux rien faire d’autres de mes mains que de me retenir de tomber plus bas. J’appelle une 1ère fois à l’aide mes compagnons qui viennent juste de s’élancer mais ils ne m’entendent pas. Je comprends alors que la chute devient inévitable. C’est le seul moment où j’ai vraiment peur. Je ne sais pas de quelle hauteur je vais tomber car je ne vois pas le fond de la crevasse.
Je tombe sur un pont de neige qui amortit très bien ma chute. Je pose ma broche à glace le plus vite possible mais aussi le plus calmement possible afin de limiter les risques de tomber plus bas dans la crevasse.
A ce moment je suis parfaitement rassuré. Les risques de chute sont fortement réduits, je présume que mes compagnons sont déjà à ma recherche et j’ai pleine confiance en eux. Ils ne devraient pas avoir trop de mal à me localiser, nous sommes tous équipés de Détecteurs de Victime d’Avalanche (DVA). Ce n’est qu’une question de temps. J’appelle à l’aide à nouveau mais l’altitude et la position inconfortable m’épuisent.
A la surface un groupe de Suisses m’entend et le guide qui les encadre engage une procédure de secours. Je sors de la crevasse grâce à la corde qu’ils me lancent. Un hélicoptère de secours qui avait été appelé arrive sur place et les secouristes me conduisent à l’hôpital de Visp pour un contrôle médical.
Dans la mesure où je ne me suis pas blessé je n’en tire que des conclusions positives. Toutes les personnes impliquées (et notamment moi-même) ont su appliquer les gestes élémentaires en conditions bien réelles avec efficacité. J’ai tout de même bien conscience que j’ai eu beaucoup de chance.
Je pourrais recommander de ne pas s’engager sur un glacier sans le matériel minimum nécessaire pour se sécuriser ou pour porter secours à quelqu’un, de savoir l’utiliser bien sûr et de ne surtout pas négliger la qualité de ce matériel même s’il ne devait servir finalement qu’assez peu voire jamais. Je recommande aussi de ne pas hésiter à se brocher. Si la victime parvient à se sécuriser, elle permet à son sauveteur d’avoir du temps pour agir et pouvoir faire les choses sans précipitation. La pire des choses serait évidemment que le sauveteur chute à son tour. »